26/02/2015
'Charlie Hebdo' reparu... Mais qu'en dire ?
À LCI, dans l'émission de Valérie Expert, j'ai posé deux questions aux trois autres invités :
'
1. pourquoi cet acharnement de Charlie Hebdo contre toutes les religions, alors que ses dessinateurs et rédacteurs n'en connaissent visiblement rien ?
2. Dans le numéro (re)paru aujourd'hui, la couverture montre une meute hurlante censée s'en prendre au journal. Parmi cette meute, le personnage le plus grand et le plus voyant est un évêque*, face déformée par la haine. Tout le monde sait que l'Eglise catholique se laisse insulter par Charlie Hebdo et ne riposte pas : subir les insultes fait partie de sa vocation d'origine. Mais pourquoi ce journal veut-il à tout prix s'imaginer attaqué par un clergé catholique haineux ?
La réponse est dans le reportage de Libération d'aujourd'hui sur Charlie Hebdo. En page 6, on voit Riss, rédacteur en chef, concevoir la couverture avec Luz : « tu peux mettre les gens du FN et tous ces trucs qui nous emmerdent », dit-il. Parmi tous ces trucs, ils mettront évidemment un évêque. Pour eux il n'y a pas de différence entre le FN et l'épiscopat... Celui-ci n'a jamais marqué la moindre connivence avec le lepénisme ? Aucune importance : le catholicisme fait partie de « tous ces trucs qui nous emmerdent », et puis c'est tout. Définition de cible un peu floue, irrationnelle en tout cas ; insuffisante pour expliquer la violence des dessins de Charlie Hebdo contre le catholicisme.
Je dis bien : contre le catholicisme. Pas seulement contre le cléricalisme. L'hebdomadaire ne fait pas seulement dans l'anticléricalisme, posture franco-française traditionnelle ; il attaque (avec une violence folle) la foi catholique en elle-même. Ou plutôt le fantasme qu'il s'en fait : un fantasme sans rapport avec le catholicisme réel, celui de l'Eglise du pape François.
Pourquoi ces jeunes dessinateurs ressentent-ils le besoin de se faire un fantasme de catholicisme puissant, dans un pays où les catholiques croyants sont devenus moins de 10 % de la population ?
Et un fantasme de catholicisme odieux, alors que le pape François est l'un des hommes les plus populaires au monde ?
Je ne vois pas de réponse à cette question. Ou j'en vois beaucoup : de la plus pessimiste (la sous-culture ambiante) à la plus discrète (l'abîme intérieur de chacun).**
Les dessinateurs de Charlie Hebdo ont parfaitement le droit d'insulter le catholicisme ; l'Eglise catholique ne leur a jamais contesté ce droit et ne s'en alarme pas. L'hebdomadaire (comme avec lui la plupart des journalistes parisiens) voudrait croire que « les religions » lui refusent « le droit au blasphème » : c'est pour ne pas avouer qu'il n'a de problème – et combien grave – qu'avec une seule religion, l'islam, et sous une seule de ses formes, l'extrémisme djihadiste.
Ce que je viens de dire m'oblige à ajouter que ce Charlie Hebdo contient un article qui ne ressemble pas aux autres : celui de Philippe Lançon sur son lit d'hôpital. C'est une méditation d'une profondeur impressionnante. Rien n'est simple.
_______________
* « Le pape », disait une dépêche hier. « Le pape », répètent les médias aujourd'hui. Il suffit pourtant d'un coup d'oeil pour voir que le dessin ne représente pas Jorge Bergoglio.
** Mais je n'ai pas laissé sans réponse, pendant l'émission, une affirmation de l'éditorialiste de l'Humanité (alors que lui et moi tombons d'accord sur nombre d'autres sujets). Maurice Ulrich estime que la cathophobie de Charlie Hebdo fait partie d'une tradition "remontant à Erasme". D'une part, c'est faire beaucoup d'honneur à l'hebdomadaire. D'autre part, il suffit de lire les textes anti-luthériens d'Erasme pour voir que l'auteur est un catholique croyant. Quand il attaque la corruption du haut clergé romain et les superstitions (Eloge de la folie, 1509), il le fait au nom de la foi***. C'est aux antipodes de Charlie Hebdo qui conchie la foi en elle-même - avec une obstination mystérieuse.
*** Raison pour laquelle le pape lui-même (Léon X) disait du bien de ce livre ?
19:15 Publié dans Médias | Lien permanent | Commentaires (24) | Tags : médias
Commentaires
'CHARLIE' EST LIBÉRAL
> Début d'explication ? Le chien le plus proche de l'évêque, sur le dessin, est L. de La Rochère, avec un T-shirt de La Manif pour tous. Si 'Charlie' s'acharne contre le catholicisme, c'est peut-être, encore et toujours, comme d'autres médias, parce que les catholiques constituent le gros de ceux qui ont manifesté contre la dissolution, la liquéfaction totale des liens sociaux de base. Oser résister à la "libération" totale des individus par le Libéralisme absolu, c'est un blasphème intolérable pour eux.
Alex
[ PP à Alex - Le chien en question porte un t-shirt LMPT mais ne représente personne précisément : c'est plutôt une allégorie, comme le chien coiffé d'une kipa à l'arrière-plan
à gauche. ]
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Écrit par : Alex / | 25/02/2015
RISS
> L'épiscopat français a une position très claire sur ce qu'il faut penser du FN; ce qui n'est pas le cas de 'Charlie Hebdo', dont on connaît la proximité idéologique avec ce parti. Riss ferait bien de balayer devant sa porte.
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Écrit par : Blaise / | 25/02/2015
PARANGONS
> Et puis, franchement, il y a comme un ridicule à défendre des parangons du progressisme au nom de la tradition...
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Écrit par : Luc2 / | 26/02/2015
LIEN
> Auriez-vous le lien vers l'émission, elle m'intéresse !
Merci cher Patrice !
Basta
[ PP à Basta - Sur 'MyTF1' : mais les podcast sont découpés en minces rondelles et difficiles à trouver parmi un flux incessant. J'ai revu hier quelques secondes de ma confrontation avec la journaliste de 'Paris-Match', c'était une très courte tranche isolée de son contexte. ]
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Écrit par : Basta / | 26/02/2015
LE POURQUOI
> Je vous admire, PP, de vous confronter aux thuriféraires de « Charlie Hebdo »…
Mais pourquoi nos concitoyens ne sont-ils pas mieux informés, davantage mobilisés ? Il faut recueillir et consigner, en mairie, dans des registres, tous les motifs de détestation anticatholique. Y compiler l’alpha et – bien au-delà des aimables « parcours alpha » des paroisses – l’oméga des haines et des peurs suscitées par l’Eglise.
Que les Français s’expriment : « Je reproche aux catholiques… », « J’ai peur des catholiques parce que… ». Que les plus hautes autorités de notre pays fassent de même, dans le sillage des caricaturistes de Charlie, pour partager leur pensée ô combien articulée et argumentée sur le sujet ! Alors nous saurons quoi faire, nous pourrons agir… La République sera sauvée !
Vous évoquez « l’abîme intérieur de chacun ». Si seulement nous avions affaire à des lépreux, des aveugles, des sourds… Mais le mal dont tous ces quincaillers de la liberté d’expression sont atteints semble en effet être de « cette espèce » dont Jésus a dit que « rien ne peut la faire sortir, sauf la prière » (Mc 9:29)… Aussi le « droit au blasphème », expression d’une profonde détresse, n’appelle-t-il de notre part qu’une seule réponse : porter dans la prière ceux qui le revendiquent, et les confier, silencieusement, à la miséricorde de Dieu.
Denis
[ PP à Denis
- Mais le problème est qu'il devient difficile, voire suspect, de poser la question du "pourquoi".
Je l'ai vérifié hier avec les autres invités de l'émission : on m'a répondu qu'une posture était une posture, que ça se suffisait à soi-même et qu'il n'y avait pas à démêler le pourquoi du comment. C'est l'idéologie (fermée) de la pub des rillettes : "nous n'avons pas les mêmes valeurs", un point c'est tout, on n'a qu'à acheter le produit - ou pas.
Et quand je dis pub : la personne la plus hostile au fait de s'interroger fut la représentante de 'Paris-Match'... (Ce n'est pas surprenant de la part de ce média).
Le représentant de 'l'Humanité', lui, a voulu rationaliser : chose honorable (et logique en théorie de la part d'un communiste). Mais ça l'a mené à rattacher 'Charlie Hebdo' à Erasme, ce qui n'est guère recevable sur le plan factuel...
- Ne m' "admirez" pas (!) de faire juste mon travail en participant à des débats ! ]
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Écrit par : Denis / | 26/02/2015
à Alex
> le drame c'est que beaucoup de manifestants LMPT restent libéraux parce qu'ils refusent de comprendre.
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Écrit par : A. Landry / | 26/02/2015
BLESSURES
> Je me dis naïvement que ces personnes sont ce qu'est l'ado en crise devant ses "vieux", leur faisant mille reproches, les insultants... et sa mère continue de le nourrir, laver ses vêtements, son père de gagner la vie du foyer! Ne pouvant leur dire "je t'aime, je vous aime" on leur dis "je te déteste, vous êtes des ratés!"
Je suis persuadé qu'il y a des blessures profondes qui expliqueraient ce comportement insultant répété! On l'observe lorsque l'on parle avec des personnes qui se sont éloignés de l'Eglise, parfois pour avoir vécu des situations scandaleuses ou révoltantes. A quand la guérison? (côté périphérie) A quand la conversion? (côté "bon catho")
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Écrit par : Didier / | 26/02/2015
@ PP
> j'ai bien ri car au début on pourrait croire que votre première réponse à Denis se rapporte à SA première phrase !
- Je vous admire, PP (...)
- D'accord avec vous.
Appelez-moi Super, pas de chichi.
www.youtube.com/watch?v=Dku3D1N5coU
EL
[ PP à EL
- Je croule de rire en constatant, en effet, que cette première phrase peut paraître répondre à celle de Denis. Je la supprime.
- En fait j'ai l'habitude de commencer mes réponses par une réaction à la dernière idée du commentaire concerné, non à la première !
- Mais bon : ça ira pour cette fois. A l'avenir appelez-moi Votre Luminescence. ]
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Écrit par : E levavasseur / | 26/02/2015
UNE THÉORIE
> Votre question : "Pourquoi ces jeunes dessinateurs ressentent-ils le besoin de se faire un fantasme de catholicisme puissant, dans un pays où les catholiques croyants sont devenus moins de 10 % de la population ?"
J'ai une théorie qui vaut ce qu'elle vaut. Tous ces jeunes vivent une vie dissolue (plus ou moins) et le seul corpus qui se dresse devant eux comme un reproche, c'est l'Eglise silencieuse et le Christ en Croix, silencieux lui aussi. Ils ne le supportent pas. C'est le syndrome Thomas More contre Henri VIII. Thomas ne dit rien et le roi le fait décapiter...
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Écrit par : stevenson / | 26/02/2015
à Stevenson
> Mais ils n'ont pas du tout l'impression que leur vie est "dissolue".
Ils sont certains que leur vie est la vie normale, la seule normalité envisageable étant la subjectivité individuelle absolue.
Ils sont certains aussi que ce qui est anormal, c'est qu'un secteur de l'opinion professe une norme différente et dise que cette norme est objective. C'est sans doute cela que Riss appelle "ce qui nous emmerde".
D'autre part ils ne voient pas que le christianisme est autre chose qu'une morale ! Ils sont persuadés que ce n'est qu'une morale, et polarisée sur l'hostilité envers le sexe. Etant persuadés aussi que la masse du clergé catholique est composée de vicieux gouvernant des crétins, ils en déduisent que le catholicisme doit être éradiqué. C'est ce que pensaient un bon nombre de Français en 1792.
Mais demandons-nous ce que nous faisons pour faire comprendre à cette opinion malveillante que notre foi n'est pas une morale et que nous ne sommes pas polarisés sur les questions sexuelles, ce qui serait le signe d'un dérèglement spirituel et mental ?
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Écrit par : Laurent Dimier / | 26/02/2015
à Laurent Dimier
> Connaissez-vous l'histoire de la mort de Voltaire ? Il l'avait d'ailleurs prévu... Je ne dis pas que votre point de vue est erroné, je dirai plutôt qu'il n'est pas universel, le mien non plus d'ailleurs. Il y a de tout et avec toutes les nuances.
Le christianisme "autre chose q'une morale". ne vaut-il pas mieux dire beaucoup plus q'une morale, dans le sens ou il est aussi une morale qui se déduit de notre foi mais qui ne la gouverne pas.
La pratique sexuelle ordonnée libère de l'esclavage du sexe. C'est pourquoi ils sont polarisés et partant ne nous parlent que de cela.
Vous n'avez pas répondu sur Thomas More: le problème d'Henri VIII ne venait-il pas du fait qu'il ne contrôlait pas ses pulsions ?
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Écrit par : stevenson / | 26/02/2015
> en effet, merci de me l'avoir signalé.
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Écrit par : à Pierrot / | 26/02/2015
Un article dans un gratuit...
> http://www.metronews.fr/info/charlie-hebdo-on-a-lu-le-numero-1179-et-c-est-bel-et-bien-reparti-comme-en-20-14/moby!0NVujgCAzHNo2/
"Enfin sur sa toute première page, dans un petit encart rouge, la rédaction de Charlie Hebdo remercie chaleureusement ses soutiens: "Merci à toutes celles et à tous ceux, adultes et enfants qui nous ont envoyé par milliers messages, lettres, textes, dessins, créations pour dire combien ils nous soutenaient, combien ils étaient touchés par la mort de nos ami(e)s".
Mais sans perdre de sa verve et égratigner le pape François au passage: "Et merci au pape, qui nous a conseillé de lire la Bible mais qui devrait relire les Evangiles, car un bon chrétien ne met pas un coup de poing quand on insulte sa mère, mais tend l’autre joue", "
Feld
[ PP à Feld - Il tend l'autre joue quand on le frappe, lui. Pas quand on frappe les autres. En outre François, en faisant cette plaisanterie, ne faisait pas un cours de théologie morale : il décrivait simplement le reflexe de la nature humaine, pour souligner la nécessité de ne provoquer personne. C'est un fait. Mais les faits n'intéressent pas 'Charlie Hebdo' : il ne connaît que ses pulsions...
L'esprit 'Charlie', c'est : "les autres me font chier." Pas étonnant que la foire d'empoigne libérale se soit reconnue dans ce journal. ]
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Écrit par : Feld / | 27/02/2015
TOUTES ?
> Contre TOUTES les religions.... Etes-vous sur ?
PH
[ PP à PH - Bon, 'Charlie Hebdo' ne s'en prend pas souvent aux parsis ou au chamanisme. Mais il montre, avec une obstination constatable, le trio évêque-imam-rabbin. Disons qu'il s'en prend à "tous les monothéismes"... Ça lui fait un conformisme de plus, l'antimonothéisme étant le pont-aux-ânes de la culture contemporaine... ]
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Écrit par : Pierre Huet / | 27/02/2015
à Stevenson
> C'est peut-être parce qu'ils sentent que nous sentons qu'ils ont "une vie dissolue" qu'ils nous confondent avec des "pères la morale" et l'Eglise avec une donneuse de leçons.
D'où tenez-vous qu'ils ont une "vie dissolue"? Vous avez des infos? À partir de quel seuil on passe d'une vie "un peu chaotique" à une vie "complètement dissolue"? Pas de relativisme moral dans ma question, juste le constat qu'on aime bien enfermer les gens dans leur situation familiale, sexuelle, "maritale", etc.
Alors, qu'ils nous prennent pour des vieux cons n'aimant pas les gens qui ne sont pas comme eux, parfois on ne l'a pas volé...
Maud
[ PP à Maud - D'accord avec vous là-dessus. J'ajoute qu'il y a, dans le milieu "conservateur", une polarisation sur les questions sexuelles qui rivalise avec l'érotomanie commerciale ambiante. ]
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Écrit par : Maud / | 27/02/2015
VOLTAIRE ET LES BOBOS
> Quoi qu'il en soit, dans la situation présente, l'analyse de Laurent Dimier est assez juste : une large partie de nos concitoyens, qui ne vivent pas chrétiennement, n'ont pas du tout l'impression que leur vie est « dissolue ». Ils vivent simplement la morale chrétienne comme quelque chose d'exotique et de liberticide.
Rien à voir avec Henri VIII et Voltaire, dont les préoccupations étaient d'ordre théologico-politique.
Voltaire, par exemple, était pour une Eglise nationale étroitement contrôlée par les pouvoirs publics (d'où son approbation de la persécution des protestants français jusque très tard dans le XVIIIe siècle).
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Écrit par : Blaise / | 27/02/2015
PRIMORDIAL
> Quelques idées pêle-mêle:
- Il vaut mieux être critiqué qu'ignoré. Au moins notre existence et par voie même de conséquence notre importance est reconnue. L'indifférent a décrété que la religion n'était pas compatible avec son égoïsme et son épanouissement égocentrique et a choisi l'ignorance. Il combat le religieux de la manière la plus pernicieuse mais la plus mortelle: sa relégation dans l'oubli.
- Les abonnés "Charlie Hebdo" que je connais ont suivi des études supérieures et mènent une vie familiale que nous jugerions conforme. Ce ne sont ni des sots ni des gens aux moeurs dissolues.
Vous dites que c'est le catholicisme qui est visé plus que la croyance en Dieu et en Christ? Précisément ils trouvent le dogme catholique ridicule (et non pas la foi), et n'importe quelle caricature anti-catho les fait beaucoup rire. Je mets cela sur le compte de l'ignorance, et comme justement pointé plus haut ils confondent catholicisme et morale sexuelle avec tous les interdits attachés.
- Si j'ai bien compris, le dernier numéro de Charlie de toute façon se vend très mal, démontrant la vacuité de la polémique sur Charlie. Le journal va retomber dans son anonymat d'antan, la vague Charlie étant plus un mouvement spontané d'indignation, de sentiment d'agression et de rejet de l'abominable: tuer sauvagement pour des idées.
- Ne soyons pas dans le culte de la persécution comme certains frères trop bien pensants. Moins de 10% restant dites vous, je voudrais croire au 10%. Le temps est majoritairement à l'évangélisation. Comme très bien expliqué par un interlocuteur sur RND, c'est l'Esprit Saint qui convertira les coeurs, pas nous. Pour autant notre tâche est primordiale: par le simple dialogue semer la petite graine qui germera espérons nous. Annonçons les deux principaux commandements donnés par le Christ, du coup la polémique sur la morale prend un caractère secondaire.
JClaude
[ PP à JClaude
Je n'ai pas dit que 'Charlie Hebdo' s'en prenait "au catholicisme plus qu'à la croyance en Dieu et au Christ" : j'ai dit qu'il s'en prenait au catholicisme en soi, pas seulement au cléricalisme. (Leurs dessinateurs passent leur temps à faire des crobars pornos sur le Christ en croix ; il y en a encore un dans le dernier numéro).
Pour le reste, d'accord avec vous, bien sûr. ]
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Écrit par : JClaude / | 27/02/2015
@ JClaude
> « La croyance en Christ » ne se dit pas. "Christ" n’est pas un nom propre mais une titulature : elle désigne le Messie, littéralement "oint de Dieu". Vous pouvez écrire « La croyance dans le Christ Jésus », ou bien « La croyance en Jésus, le Christ ». Mais confondre le nom propre (Jésus) avec le titre messianique (Christ), ce n’est pas théologiquement acceptable. Les promesses faites à Israël ne peuvent être séparées du Salut universel apporté par le Christ.
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Écrit par : Blaise / | 27/02/2015
PAS GRAND-MONDE
> Je conviens que des dessins à caractère pornographique sur le Christ, la Vierge Marie ou le pape sont de nature à choquer. Le mieux n'est-il pas le mépris silencieux? Encore un propos prélevé sur RND: "Dieu se défend très bien tout seul".
D'ailleurs ce genre de caricatures les perd: pas grand monde en effet est prêt à les suivre sur ce terrain car il y a une contrevérité inhérente perceptible à railler, humilier un homme qui est mort sur la croix en prêchant l'amour et le pardon. Aucun ne peut pas échapper à cette intuition, et au fait que ces "crobars" dépassent une simple attitude d'être "bête et méchant".
Ils se discréditent d'eux-mêmes sans que nous ayons besoin de dire grand chose. Et les personnes publiques qui trouveraient des justifications le font à des fins de récupération, là encore c'est assez flagrant.
J'aime aussi à penser qu'il reste dans la population des traces de respect pour une religion qui a façonné notre histoire qu'on le veuille ou non.
Le seul reproche que je puisse faire à ce journal, et c'est vous qui l'avez justement pointé du doigt, c'est d'avoir provoqué les islamistes avec pour représailles des exactions sur des chrétiens d'Orient. Il ne faut pas souffler sur les braises de la haine et de la discrimination. Malheureusement cette violence a fini par remonter jusqu'à eux, ce que je déplore absolument cela va s'en dire.
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Écrit par : JClaude / | 27/02/2015
@ Blaise
> Je pense que l'on me pardonnera cette abréviation de Jésus-Christ en Christ.
Je trouve vos remarques habituellement plus profondes et fécondes, à moins que le sujet "Charlie Hebdo" ne vous agace.
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Écrit par : JClaude / | 27/02/2015
@ JClaude
> Sauf qu'il ne s'agit pas d'une banale abréviation. Mais de l'effacement du sens d'un mot : sa déjudaïsation.
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Écrit par : Blaise / | 27/02/2015
LA QUESTION
> Seulement une question, peut-être méchante et que Dieu me pardonne, mais je me demande si Riss et Luz ont le talent d'un Cabu ou d'un Charb... même si on pouvait être choqués par leurs dessins, ce qui ne m'a pas empêché d'"être Charlie".
La dernière "Une" ne fait que montrer une volonté de surfer sur une vague laïciste dans la plus mauvaise acception du terme, alors qu'il y avait tant à dire sur l'actualité du moment, le "salon de l'agro-industrie" par exemple.
Pour le reste, c'est compliqué comme vous dites à la fin de votre billet, il y a aussi Fabrice Nicolino qui lui aussi continue à écrire tant bien que mal sur son lit de souffrance :
http://fabrice-nicolino.com/index.php/?p=1872
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Écrit par : Patrick Pique / | 27/02/2015
RÉFLEXIONS
> Dans le bref extrait disponible sur le site de Tf1/Lci, on vous sent esseulé Patrice, et, somme toute, emmené sur un biais-impasse, celui de l'anticléricalisme.
Anticléricalisme ? Banal, nul ne peut être contre ou s'en agacer sans aussitôt encourir les foudres de la bien-pensance.
Mais ce n'est pas d'anticléricalisme dont il est question à propos de Charlie, mais du droit à salir, à traîner dans la fange, à mentir, à injurier, à exercer toute violence verbale de circonstances, sans limite.
Le terrain sur lequel il convient d'interpeller -à mon humble avis - est autre.
C'est celui des conséquences. Les meurtres et persécutions au Pakistan (et ailleurs), consécutifs aux propos et dessins contenus dans Charlie n'ont pas ralenti l'ardeur de Charb et de son équipe, ceux du Niger ne troublent pas le moins du monde Bliss et la sienne.
Pour mémoire, une comparaison bien piètre j'en suis conscient, quand Benoît XVI prononce son célèbre discours de Ratisbonne le 12 septembre 2006, citant au passage Manuel II Paléologue:
"Montre-moi ce que Mahomet a apporté de nouveau et tu ne trouveras que du mauvais et de l'inhumain comme ceci, qu'il a prescrit de répandre par l'épée la foi qu'il prêchait".
Nous eûmes comme conséquences, l'une de faible importance, un tollé général dans la presse occidentale, et, beaucoup plus dommageable, des morts de chrétiens par assassinat en représailles, en Turquie en particulier.
Sachant que le propos n'était jamais qu'une citation, et qu'il s'inscrivait dans une réflexion théologique sur la foi et la violence beaucoup plus générale et - surtout - aux altitudes habituelles, c'est-à-dire stratosphériques, de la pensée théologique du précédent Souverain Pontife.
Malgré tout cela, et il y avait matière à ergoter, défendre, disputer, Benoit XVI a choisi de rendre encore plus évidence son souci de la rencontre, de l'échange avec le monde musulman (tout ceci est clairement exprimé dans le livre d'entretiens avec le journaliste Peter Seewald "Lumière du monde", paru en 2010).
On le sait depuis la nuit des temps (dès, par exemple, les premiers faux-témoignages) les mots tuent.
Mais la pensée liberale-libertarienne (et athée) ne s'en soucie guère, j'ai souvenir que le contraire (ni les mots, ni les dessins ne tuent) a même été puissamment affirmé le mois dernier par tout ce que le pays comptait de représentants, médiacrates et leaders d'opinion dans les réactions qui suivirent les attentats de Paris.
Et la même pensée dominante fera l'économie de compter les morts et persécutions qui découlent directement des publications de Charlie.
C'est pourtant sur cette partie-là, la plus grave, la seule conséquente en fait, qu'il faut alerter l'opinion et lui fournir matière à réflexion.
Mais, songer à ces morts, à ces persécutions, cela "fera chier", et "emmerdera": ce sera donc tenu pour nul et non avenu, la preuve ? C'est non seulement désagréable mais même -ultime outrage- culpabilisant pour le lecteur de Charlie, rendez-vous compte...
Aventin
[ PP à Aventin - L'extrait TF1 est trompeur à force de brièveté. J'étais en position d'attaquant dans ce débat, et j'insistais justement, avant et après, sur l'ignorance totale de 'Charlie' en matière de CONTENU des religions. ]
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Écrit par : Aventin / | 28/02/2015
PARLER OU NON
> 'Charlie Hebdo' n'est qu'une relique païenne d'une époque révolue où certains se sont "éclatés" à renverser tous les tabous de parents jugés coincés, à combattre toutes les formes d'autorité et prôner la libération sexuelle.
Sans doute sont ils un peu piégés dans cette image pour multiplier à ce point les caricatures obscènes sur le catholicisme réduit à sa simple barrière morale.
Faut-il chercher d'autres raisons plus sombres, quel intérêt vraiment sinon pour des psychanalystes?
Certes c'est agaçant de les voir représenter désormais et partout dans le monde la liberté d'expression, mais nous n'allons quand même pas leur reprocher d'avoir été abattus comme des animaux et par la même être devenus ce symbole ?
Par décence laissons le soufflé retomber, surtout quand, sans le talent d'un Cabu ou d'un Wolinski, leur situation risque de devenir encore plus critique qu'avant.
Nous sentons nous insultés ? Heureux sommes nous.
Nous sentons nous le devoir de défendre Dieu, oublions vite cette coupable vanité.
La seule vraie question insuffisamment posée est celle de leur irresponsabilité. Il ne faut pas souffler sur les braises de la haine (je parle des islamistes).
La limite est là.
JClaude
[ PP à JClaude - Presque entièrement d'accord. A deux nuances près :
1. L'ide de "défendre Dieu" est une hérésie que ce blog a toujours combattue. Je ne vois pas pourquoi vous semblez nous l'attribuer.
2. Parler du cas 'Charlie' était nécessaire si l'on nous y obligeait : ce qui a été le cas dans la presse et à la télévision. Notre devoir était de dire au grand public : a) qu'on le désinforme en lui racontant que l'Eglise catholique fait la guerre à 'Charlie', b) que la phobie de ce journal envers l'Eglise catholique ne repose sur rien. Nous taire serait revenu à avaliser la campagne "cathos = islamistes" qui fait des ravages dans l'opinion. ]
réponse au commentaire
Écrit par : JClaude / | 01/03/2015
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